APPROCHE AGROTECHNIQUE POUR LE MAINTIEN DES DOSES DES INTRANTS SYNTHETIQUES AUX NORMES ECOLOGIQUES.

Eric Adjégan ADJETEY-BAHUN

Ingénieur Agronome,
PhD in Agriculture.

Ces derniers temps, beaucoup de voix se plaignent d’une certaine baisse des qualités gustative et alimentaire des produits vivriers. La cause le plus souvent indexée, c’est l’utilisation à outrance des fertilisants synthétiques et des pesticides chimiques d’où l’exigence d’une agriculture biologique exclusivement développée sur amendement organique. La défaillance de la qualité des produits peut être vraie mais si la cause indiquée est la vraie, l’agriculteur a la possibilité d’y remédier ou l’atténuer.

La pratique d’une agriculture strictement biologique est possible sur les petites superficies maraîchères ou potagères ou en agriculture de case, mais ce serait illusoire de vouloir l’entreprendre en agriculture champêtre car ici, elle risque d’être peu rentable pour le producteur, même si le sol contient naturellement de la matière organique. Dans tous les cas, l’approche la plus réaliste, c’est l’utilisation des intrants incriminés aux normes écologiques adaptées aux Espèces et Variétés cultivées. Prenons le cas spécifique des engrais. Pour arriver à en réduire les dosages et les fréquences d’apport, il convient qu’entre la monoculture et la polyculture, l’agriculteur fasse le choix judicieux pour ne pas râter l’objectif théorique universel : l’obtention du maximum de produit au meilleur coût pour le meilleur prix par unité de surface.

La monoculture se pratique sous deux formes : la culture pure (25% environ des terres cultivées en Afrique) et l’association culturale ou culture mixte. C’est la culture de la (des) même (s) Espèce (s) sur la même parcelle pendant plusieurs années de suite. Elle n’est souvent rentable que les premières saisons de sa pratique ; à la longue des inconvénients apparaissent :

  • La terre est ameublie à la profondeur travaillée en permanence ;
  • La couche arable se fatigue et perd ses qualités agricoles suite à l’exportation des mêmes éléments minéraux nutritifs par les plantes de l’Espèce cultivée pendant plusieurs années successives ;
  • Les exigences alimentaires des plantes ne sont plus satisfaites et leurs productivités baissent ;
  • Les Espèces adventices, les insectes parasites et les agents pathogènes se spécialisent et prolifèrent en permanence.

Il convient absolument que nous retenions que le retour répété des mêmes types d’association sur une même parcelle est une monoculture quand bien même elle permettrait à l’agriculteur de récolter plus d’une culture à la fin de chaque campagne.

La polyculture est la voie technique la plus indiquée pour atténuer les inconvénients ci-dessus énumérés. Elle nécessite une répartition scientifique des cultures dans l’espace et dans le temps. La répartition dans l’espace s’appelle Assolement ; celle dans le temps est désigné par le terme Rotation.

L’assolement consiste au partage du champ en des parcelles plus ou moins régulières qu’on appelle des Soles. La rotation c’est l’ordre de succession ou d’alternance des cultures (ou des associations de cultures) sur une même sole. Dans un système d’assolement, les plantes cultivées, les pâturages ou jachères entretenues compris, grâce à leur diversité biologique, contribuent à la résolution naturelle des problèmes qui surviennent habituellement en monoculture. En effet, l’alternance des cultures favorise :

  • L’amélioration de la structure du sol (la profondeur d’enracinement des cultures varie) ;
  • L’utilisation rationnelle des réserves d’eau telluriques ;
  • L’atténuation de la spécialisation des adventices et de la prolifération des maladies et des parasites des plantes cultivées ;
  • L’utilisation rationnelle des réserves chimiques naturelles du sol et l’amélioration de ses qualités chimiques (certaines cultures enrichissent le sol en certains éléments minéraux nutritifs).

Pour bénéficier de ces atouts, l’agriculteur devra prendre en compte les règles suivantes, lors de l’établissement de la succession des cultures sur la même sole :

       – Les mêmes plantes ou les plantes de mêmes besoins nutritionnels, sensibles aux mêmes maladies ou exigeant les mêmes façons culturales ne devront ni se suivre ni revenir souvent sur la même sole ;

       – Les plantes à racines profondes alterneront avec les plantes à racines superficielles ;

       – Les plantes améliorantes occuperont une place convenable pour enrichir le sol en matière organique ; elles seront choisies comme précédents culturaux pour les Espèces très exigeantes en azote (pour la culture présente cette saison sur une sole, celle qui a occupé la sole au cours de la saison écoulée est son précédent cultural).

       – Les cultures les plus exigeantes suivront les meilleurs précédents.

       – Les Espèces capables de revenir sur elles-mêmes (les Céréales surtout) ne le feront pas plus de deux fois.

Conclusion

L’obligation d’apporter de fortes doses d’engrais (fertilisants synthétiques) et d’augmenter les fréquences d’utilisation des pesticides aussi bien en maraîchage qu’en agriculture champêtre est une conséquence de la pratique trop soutenue de la monoculture. L’association culturale n’est pas une polyculture ; lorsqu’elle est pratiquée pendant plusieurs années successives sur une parcelle, elle influe autant négativement sur la qualité agricole du terrain que la culture pure entreprise dans les mêmes conditions. L’assolement est la meilleure voie qui puisse mener à une agriculture écologique raisonnée. Sur les sols normaux, il permet de diversifier les formules de fumure sur les parcelles cultivées, de baisser considérablement les dosages des fertilisants synthétiques y entrant et de mieux les équilibrer. En outre, dans sa pratique, les cultures, grâce à leur diversité biologique, contribuent au maintien de la qualité agricole du sol et à la réduction au strict minimum des besoins d’utilisation des pesticides. En agriculture intensive champêtre, il n’est pas aisé de supprimer radicalement les pesticides chimiques (herbicides et insecticides) des techniques culturales. Contrairement aux informations souvent exagérées qui circulent en ces moments, ceux homologués sont quasi sans nuisances majeures, lorsque des dispositions sont prises pour observer les principes d’agrobiologie (produits sélectifs pour les Espèces et Variétés en place, à rémanence courte, non toxiques pour les humains et les animaux non visés, ne s’accumulant ni dans le sol ni dans les récoltes, ne restant en suspension ni dans l’atmosphère ni dans l’eau d’infiltration) et que les recommandations concernant les moments et délais de leurs applications sont respectés.

Lomé, Travaux eadjétey, mars 2022

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